Avis déposé par le SEUQAM – consultation en vue de la préparation du Plan stratégique 2014-2019 de l’UQAM

Monsieur le recteur Robert Proulx,

Il y a quelques semaines, vous avez invité les membres de la communauté à prendre part à un exercice de réflexion et d’échange dans le but d’alimenter le plan stratégique qui devra guider notre Université de 2014 à 2019. Nous saluons cette initiative.

Il nous semblait essentiel que vous puissiez connaitre l’avis du SEUQAM face aux éléments qui font l’objet de cette consultation. Vous remarquerez que cet avis porte essentiellement sur les éléments de consultation touchant les conditions de travail de nos membres.

Précisons enfin que ce document est le fruit de la réflexion des membres du Comité exécutif du SEUQAM et n’a pu, compte tenu du court délai qui nous était imposé, être soumis aux membres que nous représentons.

Les valeurs

Sur les dix valeurs ou principes que vous énoncez comme devant inspirer les actions, les orientations et les décisions de l’UQAM, nous laissons à d’autres groupes le soin de se prononcer sur la liberté académique et l’autonomie institutionnelle.

Il nous apparait clairement que la qualité du milieu de vie se positionne comme une prémisse aux autres valeurs énoncées. Le milieu de vie dans lequel le personnel de l’UQAM évolue détermine fondamentalement sa capacité à jouer pleinement son rôle dans la réussite de notre université.

Parler de la qualité d’un milieu de vie dans notre contexte de travail est très large. Cela englobe à la fois l’environnement physique, mais également social dans lequel nos membres évoluent quotidiennement. Ainsi, le plan stratégique devra prévoir des mesures visant à assurer que les conditions qui entourent le travail du personnel soient adéquates à l’accomplissement de sa tâche et puissent permettre ainsi son épanouissement.

Les membres que nous représentons sont attachés à l’UQAM et peuvent, dans un milieu de vie adéquat, l’aider à atteindre et dépasser ses objectifs. Les conditions de travail facilitent naturellement une adoption des valeurs que vous proposez. Notamment, les employés de soutien seraient plus facilement engagés et feraient plus naturellement preuve d’excellence, d’audace, de dépassement, de collaboration et d’ouverture dans un milieu de travail où ils seraient heureux de travailler. De plus, à ces éléments nous ajouterions que le milieu de vie devra également être empreint de reconnaissance et de respect. Nous pourrions aisément vous parler de plusieurs de nos membres qui ont accompli de grandes choses dans le contexte de leur travail, qui ont su faire preuve d’initiative et qui contribuent au rayonnement de notre université sans que cela ne soit ni soutenu, ni reconnu et encore moins valorisé.

Les orientations stratégiques

Recherche et création

Comme vous l’avez dit lors des périodes de consultation, vous considérez la recherche et création comme le moteur de l’université. La qualité des activités de recherche et création est indissociable des personnes qui les effectuent : professeurs, étudiants et employés de soutien (trop souvent à statut précaire). Qu’il s’agisse d’étudiants qui viennent de finir leurs études et qui continuent à être embauchés dans leur groupe de recherche, ou bien qu’il s’agisse d’aller recruter un spécialiste à l’extérieur, le personnel de recherche (principalement employé sous octroi de subvention, mais parfois aussi à forfait de services professionnels) détient une expertise dont ne peuvent se passer les groupes de recherche. Leurs conditions de travail ont donc un impact sur la performance de l’UQAM.

Un récent rapport déposé au FRQ (Fonds de Recherche du Québec) et qui portait sur les professionnels de recherche montrait que la précarité était un facteur important de stress chez cette catégorie de personnel (taux de roulement élevé). En créant davantage de postes en recherche et création, l’Université s’assurerait à la fois de conserver l’expertise de son personnel dans ces domaines tout en augmentant sa capacité à obtenir des subventions et à démontrer de l’excellence en recherche, création et innovation.

En ce qui a trait à la recherche et à la création, les objectifs prioritaires de l’UQAM pour 2014-2019 devraient inclure les suivants:

–          S’assurer de l’adéquation entre les buts et les moyens : employés en nombre suffisant, formés, disposant des moyens (technique et financier) nécessaires, correctement encadrés, et reconnus pour leurs fonctions.

–          Reconnaitre l’importance des employés de soutien dans les activités de recherche et création.

–          Travailler sur la précarité des employés de soutien pour éviter une perte d’expertise.

Formation : étudiants et employés

Dans le secteur académique, les professeurs (et chargés de cours) et les employés de soutien sont à la première ligne de la formation des étudiants. Que ce soit dans les facultés (ou écoles) ou les départements, les employés de soutien restent en place plus longtemps que les gestionnaires issus du milieu professoral (doyens, directeurs de département) : c’est en eux que s’accumulent l’histoire de leur milieu de travail et les connaissances qui y sont spécifiques. Le personnel de soutien est aussi une interface importante avec les étudiants : pour un étudiant, l’UQAM c’est ses professeurs et son assistante de gestion de programme. Enfin, les employés de soutien participent aussi directement aux activités de formation : par exemple, les techniciens de laboratoire ou les employés des bibliothèques. Des ressources et une formation adéquate des employés de soutien ainsi qu’un milieu de travail bien géré où les employés ont envie de rester sont autant d’éléments clés du succès des étudiants.

Comme vous le présentez dans vos orientations, l’UQAM doit aussi faire face à de nouvelles réalités. Il est fondamental d’assurer la formation du personnel en place afin qu’il puisse s’adapter à ces changements. Il serait regrettable de justifier l’embauche de personnel externe à contrario d’offrir au personnel à l’interne de nouvelles opportunités de développement professionnel. Dans certains secteurs, cette remarque vaut aussi pour le recours à la sous-traitance. Une bonne planification de la main-d’œuvre permettra sans aucun doute de développer les ressources en place dans ce domaine et d’offrir des formations de qualité.

En ce qui a trait à la formation, les objectifs prioritaires de l’UQAM pour 2014-2019 devraient inclure les suivants:

–          S’assurer de l’adéquation entre les buts et les moyens : employés en nombre suffisant, formés, disposant des moyens (technique et financier) nécessaires, correctement encadrés, et reconnus pour leurs fonctions.

–          Valoriser l’expertise des employés de soutien et favoriser l’utilisation des compétences disponibles à l’interne.

–          Offrir aux employés de soutien l’opportunité d’accompagner l’UQAM dans son évolution.

Internationalisation

La présence d’étudiants non francophones et les échanges avec des universités partenaires à l’international ne doivent pas nous faire oublier que nous sommes une université francophone. Ainsi, même si certains services pourront occasionnellement être offerts dans une autre langue que le français, la promotion du français au travail et aux études devra être intégrée dans le prochain plan stratégique. Si le français est actuellement en perdition à Montréal, un établissement tel que le nôtre se doit de résister à ce courant.

Un examen approfondi des situations incontournables à l’occasion desquelles les services rendus par le personnel devront l’être dans une langue autre que le français se doit d’être réalisé. Une fois établies, ces exigences d’une autre langue devront être officiellement reconnues et compensées. Par ailleurs, l’internationalisation de l’UQAM, si elle veut être réussie, passera par une adéquation entre les ressources et les objectifs de l’UQAM. Plusieurs services ou postes seront directement touchés (nous pensons par exemple au Registrariat, au Service des relations internationales, au Bureau du recrutement, aux agents de stage…), tant dans le type de travail à fournir que dans la quantité de travail. Si la langue peut être une difficulté, la culture peut l’être tout autant, et le personnel devra avoir accès aux outils nécessaires pour gérer les nouveaux éléments de leurs tâches. Enfin, n’oublions pas que nos membres qui se déplacent à l’étranger, tout simplement en effectuant leur travail, donnent une image de l’UQAM. Meilleures seront leurs conditions de travail, meilleure sera l’image de l’UQAM qu’ils véhiculent.

En ce qui a trait à l’internationalisation, les objectifs prioritaires de l’UQAM pour 2014-2019 devraient inclure les suivants:

–          S’assurer de l’adéquation entre les buts et les moyens : employés en nombre suffisant, formés, disposant des moyens (technique et financier) nécessaires, correctement encadrés, et reconnus pour leurs fonctions.

–          Affirmation du caractère francophone de l’UQAM.

–          Reconnaissance des besoins particuliers issus de l’internationalisation.

Environnement de travail

Notre travail syndical nous permet de constater que trop souvent les pratiques de gestion des ressources humaines dans notre université sont défaillantes et source de dysfonctionnement. Ces situations dégénèrent souvent en défaveur de l’université, en laissant parfois sur leur chemin des blessures individuelles : arrêts pour maladie, longs processus de gestion des cas de harcèlement psychologique ou de résolution de conflit, ou, plus simplement, démotivation et désengagement du personnel.

Vous parlez régulièrement de l’approche collaborative. Une telle vision nous semble tout à fait essentielle pour assurer un développement adéquat de notre université et pour qu’elle continue de contribuer à l’enrichissement des personnes, au mieux-être des citoyens et à la croissance économique de la société. Mais cette vision devrait se traduire aussi dans le fonctionnement interne de l’université. Ainsi, les pratiques de gestion qui incluent des évaluations quantitatives de performance devraient céder le pas à des analyses plus poussées de l’adéquation entre les services rendus et les besoins de la collectivité. Particulièrement, il faudrait établir le principe d’une structure de gouvernance participative, et ce à tous les niveaux de l’organisation : les employés de soutien détiennent une connaissance approfondie de l’Université et devraient toujours pouvoir prendre part aux prises de décision qui concernent notre établissement. Les points suivants en découlent naturellement :

–          Faire les représentations politiques afin que la personne représentant les employés de soutien sur les conseils d’administration des universités détienne un droit de vote.

–          Donner aux employés de soutien un réel pouvoir dans la désignation du Recteur, et pas seulement une voix pour l’ensemble des employés de soutien, alors que chaque cadre, chaque professeur avec son propre vote peut annuler la prise de position de l’ensemble des employés de soutien. Vous l’avez dit vous même à plusieurs reprise, vous n’avez trouvé personne pour dire que cette situation était normale.

–          Plus généralement, revoir le Règlement No3 « Règlement des procédures de désignation » afin que les procédures soient davantage représentatives des groupes qui composent l’UQAM.

Certains services indispensables au bon fonctionnement de l’Université ne devraient pas être vus comme des centres de profits ni facturer leurs services à l’interne, ou devoir être rentables pour exister. Les services qui ont des contrats avec l’extérieur devraient avoir les moyens de traiter plus favorablement les demandes issues de la communauté. Les services devraient disposer des ressources leur permettant d’accomplir la tâche qui nécessite leur existence. Ces situations génèrent du conflit entre nous, alors que nous devrions, justement, collaborer pour le bon fonctionnement de l’Université!

En ce qui a trait à l’environnement de travail, les objectifs prioritaires de l’UQAM pour 2014-2019 devraient inclure les suivants:

–          S’assurer de l’adéquation entre les buts et les moyens : employés en nombre suffisant, formés, disposant des moyens (technique et financier) nécessaires, correctement encadrés, et reconnus pour leurs fonctions.

–          Revoir les compositions des instances décisionnelles pour les rendre plus représentatives de la communauté et les faire bénéficier de l’expertise des employés de soutien.

–          Travailler sur les conditions de travail (environnement, gestion) pour prévenir l’apparition de situations problématiques.

–          Être attentif aux situations potentiellement problématiques et ne pas attendre qu’elles aient dégénéré pour tenter de s’en occuper.

–          Améliorer les procédures de gestion de situations problématiques une fois qu’elles apparaissent.

–          Recourir plus régulièrement aux solutions déjà prévues par la convention collective, comme le Comité sur l’organisation du travail.

–          Promouvoir la collaboration à l’interne aussi, avec les adaptations organisationnelles et en terme de ressources que cela implique.

–          Favoriser l’acquisition de nouvelles expériences à l’interne pour le personnel afin de permettre un meilleur développement des compétences, en ayant la possibilité de faire carrière à l’UQAM.

La place de l’UQAM dans la société

L’UQAM a une tradition de services aux collectivités et de liens avec celles-ci. Cette tradition se traduit dans ses activités de recherche (et d’enseignement) tant dans leurs objets que dans leurs retombées, mais aussi dans l’implication de ses membres, qu’il s’agisse de professeurs, de chargés de cours, d’étudiants ou d’employés de soutien. L’UQAM joue aussi un rôle social, que ce soit en intervenant dans les médias, en accueillant des étudiants de première génération ou en formant des étudiants dont l’implication sociale peut avoir (et a déjà eu) un effet majeur sur la société.

Ce rôle social, qui fait en grande partie l’image de l’UQAM, devrait être maintenu. Il contribue à distinguer l’UQAM comme université unique. La tâche normale d’un professeur comporte d’ailleurs explicitement ce rôle social dans sa composante « service à la collectivité à l’extérieur de l’Université ». L’UQAM renforcerait son rôle et son image en offrant à ses employés de soutien un cadre dans lequel ils pourraient eux aussi avoir une implication bénévole auprès d’organismes ou de groupes sociaux. Les meilleurs ambassadeurs de l’UQAM, ce sont ses membres : un étudiant bien formé; un employé de l’UQAM impliqué dans la communauté; un professeur en sabbatique invité dans une autre université.

En ce qui a trait à la place de l’UQAM dans la société, les objectifs prioritaires de l’UQAM pour 2014-2019 devraient inclure les suivants:

–          Défendre le rôle social de l’UQAM.

–          Faciliter l’implication sociale des membres de la communauté.

–          Miser sur la communauté de l’UQAM pour transmettre ses valeurs.

Le futur de notre université

Relativement aux défis que l’UQAM aura à relever dans les cinq prochaines années, nous pourrions citer les suivants :

–          L’amélioration des conditions de travail : un environnement de travail convivial, exempt d’irritants physiques, sociaux et psychologiques, une gestion des employés motivante, une gestion proactive de conflits, un climat de confiance, autant de points qui amélioreraient l’efficacité des employés de soutien en augmentant la motivation et en limitant les baisses de productivité dues à la maladie. Nous constatons malheureusement une tendance inverse; ceci est à nos yeux un clair défi.

–          Les départs massifs à la retraite : le processus déjà amorcé de départs à la retraite va se poursuivre dans les prochaines années. Il est primordial que l’Université se dote d’un programme de planification de la relève : recrutement privilégié à l’interne, période de chevauchement entre le futur retraité et son futur remplaçant…

–          Retravailler son image : l’UQAM a particulièrement été touchée par des conflits lors des dernières années (grève des professeurs, conflits étudiants, scandales de gestion, financiers ou immobiliers). Nous pouvons être fiers que les mouvements sociaux prennent souvent leur origine au sein de notre établissement, mais la gestion de l’image de l’UQAM est encore un chantier en cours.

Enfin, en ce qui a trait aux meilleurs atouts ou leviers dont dispose l’UQAM, nous ne pouvons que vous rappeler l’excellence de son personnel et les outils dont vous disposez pour en accroitre le sentiment d’appartenance et les accomplissements. Le personnel de l’UQAM est attaché à son Université, mais il souffre d’un manque criant de reconnaissance et de ressources. Que le plan stratégique 2014-2019 mise sur son personnel et l’UQAM occupera la place qui lui revient dans le paysage universitaire, et ce à l’échelle nationale et internationale.

Conclusion

Pour finir, nous souhaiterions reprendre les propos que vous teniez lors de votre allocution de la rentrée 2013. Ils résument ce que le plan stratégique devrait refléter :

« S’assurer de mettre en place un milieu de travail et d’études accueillant, sain, dynamique, stimulant et attractif, où l’expertise, les mérites et les réalisations des membres sont soutenus, reconnus et valorisés, dans le cadre d’une gouverne collégiale, participative et responsable, voilà qui devrait constituer une priorité d’action pour l’institution. (…) Tous les membres de cette communauté — le corps professoral, les personnes chargées de cours, les cadres et le personnel de soutien, les étudiantes et étudiants — jouent un rôle essentiel dans l’accomplissement de cette mission. En retour, l’Université doit offrir à chacune, à chacun, les meilleures occasions d’épanouissement personnel et professionnel. »

Le Comité exécutif du SEUQAM

Soyez le premier à commenter

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée.


*